« Le métier d’infirmière a toujours fait partie intégrante de ma vie », déclare Natalia Chikovani, une infirmière travaillant dans une clinique privée de Tbilissi (Géorgie). Natalia, qui a aujourd’hui 32 ans, parle de la difficulté d’être infirmière dans son pays. Elle a étudié les soins infirmiers dans une école de formation professionnelle, mais affirme avoir acquis la plupart de ses connaissances par la pratique.
« Durant les 13 ans où j’ai travaillé comme infirmière dans des cliniques privées, j’ai eu un certain nombre de formations, et rien ne vaut l’expérience acquise sur le terrain », dit-elle. « Je dois mes aptitudes à mes collègues et à mes superviseurs, qui m’ont formée au fil des ans. »
Être infirmière « peut être un combat quotidien »
Selon Natalia, la pénurie de personnel infirmier peut poser un véritable défi.
« Depuis un certain temps, très peu de jeunes choisissent la profession d’infirmier, ce qui signifie que nous avons de moins en moins de nouveaux infirmiers au travail. »
De nombreux pays ne produisent pas suffisamment de diplômés en soins infirmiers pour répondre à la demande de leur population. Natalia explique que l’une des raisons de cette pénurie est que la profession d’infirmier n’est pas suffisamment valorisée.
« J’ai souffert de stigmates sociétaux et culturels. Les gens disent parfois : « Elle n’a pas réussi à devenir médecin, alors elle a choisi d’être infirmière ». Mais les gens ne réalisent pas que ce sont 2 professions très différentes. Ainsi, notre travail peut parfois être un combat de tous les jours. »
En raison des bas salaires, les infirmières ont du mal à joindre les deux bouts. De nombreux collègues de Natalia doivent faire des heures supplémentaires ou travailler dans plusieurs cliniques pour gagner leur vie. Selon elle, cette situation a entraîné une diminution des capacités et peut avoir un impact négatif sur la qualité des services fournis par le personnel infirmier.
« Je pense que nous devons investir davantage dans l’enseignement, la formation continue, les infrastructures et de meilleurs salaires », ajoute-t-elle. « Cet aspect, et un environnement de travail adéquat, sont essentiels pour empêcher la main-d’œuvre de partir vers des pays plus développés. »
L’un des effets de la pandémie de COVID-19 est de braquer les projecteurs sur les soins infirmiers, ce qui rend la profession plus visible dans la médecine moderne, explique Natalia.
« De nombreuses personnes autour de nous ont commencé à remarquer le rôle vital que nous jouons pour la préservation de vies humaines. »
Investir dans l’enseignement, la formation continue et le leadership du personnel infirmier
En Géorgie, le nombre d’infirmiers et d’infirmières est inférieur à la moyenne de la Région européenne de l’OMS.
Alors que le ratio moyen entre infirmiers et médecins est de 2,3 dans la Région, ce chiffre n’a pas dépassé 0,8 depuis 2014 en Géorgie. Dès lors, il y a moins d’un membre du personnel infirmier par médecin, et dans les zones montagneuses de la Géorgie, cette pénurie est encore plus criante.
« Le gouvernement devrait envisager d’investir dans la formation initiale et continue du personnel infirmier », déclare Maia Gogashvili, directrice du département Soins infirmiers à l’Université de Géorgie, l’une des rares écoles géorgiennes à délivrer des diplômes de licence en soins infirmiers.
« Je crains que le nombre restreint de jeunes qui s’inscrivent à nos cours n’ait des conséquences désastreuses pour le système de soins de santé de la Géorgie », ajoute Maia. « L’une des mesures pourrait consister à exiger un salaire minimum pour le personnel infirmier et un certain ratio infirmier/patient, tant dans les cliniques publiques que privées. »
« En investissant dans le personnel infirmier et en encourageant son autonomie dans le cadre de la loi, on pourrait renforcer les soins de santé primaires et obtenir de meilleurs services pour la population », ajoute Maia.
« Cela sera essentiel pour éviter une crise grave, créer des emplois durables et attirer la prochaine génération d’infirmiers et d’infirmières. »
L’année 2021 a été proclamée « Année internationale des personnels de santé et d’aide à la personne » par l’OMS. En cette Journée de la couverture sanitaire universelle (CSU), qui a lieu chaque année le 12 décembre, l’OMS/Europe met à l’honneur tous les travailleurs du secteur de la santé et des soins, en appelant les gouvernements à protéger et à investir dans le personnel.
L’investissement dans la formation, l’emploi, la prestation de services et le leadership du personnel infirmier est encouragé par la « Feuille de route pour l’encadrement de la mise en œuvre des orientations stratégiques mondiales pour les soins infirmiers et obstétricaux dans la Région européenne de l’OMS 2021-2025 », en cohérence avec la CSU et les objectifs de développement durable des Nations Unies.
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Le contenu de cet article a été modifié le 22 décembre 2021 car la version antérieure faisait incorrectement référence à « l’Université libre » alors qu'il s'agit de « l’Université de Géorgie ».