Le lundi 25 septembre, alors que des milliers de réfugiés fuyaient vers l’Arménie depuis la Région du Karabakh, une puissante explosion dans un dépôt de carburant a fait plus de 200 morts et plus de 300 blessés graves. Afin de soutenir les soins aux brûlés, l’OMS/Europe a activé une cellule de coordination des équipes médicales d’urgence sous la direction du ministère arménien de la Santé. Des équipes de soins spécialisées dans la gestion des brûlures originaires de plusieurs pays sont rapidement arrivées sur place, et ont travaillé aux côtés du personnel médical arménien pour prendre en charge le nombre exceptionnellement élevé de brûlés, depuis les premiers stades du traitement jusqu’à la réadaptation.
L’équipe médicale d’urgence israélienne
Une équipe médicale d’urgence israélienne a été la première sur le terrain après l’explosion, et y est restée pendant près de 2 semaines. « L’équipe comprend des chirurgiens plasticiens, 1 anesthésiste, des personnels infirmiers et des spécialistes de la prise en charge de la douleur. Nous travaillons dans 4 salles d’opération différentes », avait alors déclaré le docteur Shai Schul, chef d’équipe de l’équipe israélienne composée de 14 personnes.
Les professionnels de santé ont aidé les équipes médicales arméniennes à soigner environ 250 personnes, dont certaines avaient subi de graves brûlures sur 70 à 90 % de leur corps.
« Lorsque l’explosion s’est produite, de nombreuses personnes ont instinctivement protégé leur visage en le couvrant de leurs mains, qui ont alors été gravement brûlées. D’autres ont essayé de fuir en rampant sur leurs genoux, ce qui leur a valu des brûlures aux jambes », a expliqué le docteur Schul.
Certains des patients étaient des enfants.
« Nous avons opéré un bébé de 1 an qui souffrait de brûlures. Son visage n’était pas brûlé car sa mère ou son père lui avait couvert la tête. Toutes les brûlures se trouvaient dans son dos et sur sa jambe. Il a été protégé par ses parents. »
Le docteur Schul a expliqué comment son équipe a travaillé jour et nuit dans les salles d’opération, côte à côte avec l’équipe arménienne, dans un processus d’apprentissage mutuel.
« Cette équipe est habituée à soigner les brûlures ; c’est son travail quotidien. Mais dans le plus grand hôpital de Jérusalem, par exemple, ils voient 1 ou 2 cas par semaine. Ici, les cas se succèdent les uns après les autres. Ils effectuent 20 opérations par jour », a-t-il ajouté.
B-FAST, une équipe médicale d’urgence de Belgique
Bert Torfs, chef de l’équipe d’évacuation sanitaire belge B-FAST, a également été choqué par l’ampleur des blessures.
« Dans des circonstances normales en Belgique, les médecins voient 1 de ces grands brûlés 1 fois par mois. Mais ici, on a vu 200 de ces patients en une seule fois. Le ministère de la Santé arménien et l’ensemble du personnel médical font un excellent travail avec les moyens dont ils disposent, mais cette situation dépasse vraiment leurs limites et celles de nombreux pays, y compris la Belgique. »
Son équipe était spécifiquement chargée de l’évacuation des patients. Outre la mise à disposition de spécialistes des brûlures et d’autres membres du personnel médical, l’équipe de gestion a veillé à ce que chaque étape du processus d’évacuation complexe se déroule sans heurts, tant sur le plan médical que sur le plan logistique.
« Lorsqu’ils arriveront à l’aérodrome à Bruxelles, une ambulance les attendra. Les ambulanciers auront été informés par nos experts ici, de sorte que lorsque les patients sortiront de l’avion, les médecins connaîtront déjà leur identité et seront au courant de leur situation. Ils les emmèneront ensuite au centre des grands brûlés », a expliqué Bert Torfs.
La Bulgarie, l’Espagne, l’Italie et la Roumanie ont apporté leur soutien à d’autres évacuations médicales dans le cadre du Mécanisme de protection civile de l’Union européenne.
L’équipe médicale italienne en Arménie
L’équipe médicale ITA du Service italien de la protection civile a organisé le déploiement d’une équipe de spécialistes des brûlures à la demande du gouvernement arménien. Cette équipe de 6 professionnels s’occupe actuellement de 23 blessés au Centre médical d’Erevan, dont 5 sont en soins intensifs.
L’équipe travaille conjointement avec les chirurgiens plasticiens et les anesthésistes de l’hôpital, procédant ensemble à des évaluations et à des opérations.
« La collaboration avec l’équipe médicale locale est fondamentale », a expliqué Gabriella Proietti, qui dirige l’équipe médicale italienne. « La planification des opérations chirurgicales en fonction des ressources disponibles est essentielle à la réussite. Ensemble, nous pouvons cibler les priorités et planifier les activités ultérieures. Comme par exemple la nécessité de commencer par des greffes de peau sur les mains plutôt que sur les membres inférieurs, de sorte qu’une fois les plaies cicatrisées, le patient puisse devenir indépendant et commencer à manger, ce qui favorise sa guérison. »
Lorsque l’équipe de spécialistes est partie à la fin du mois d’octobre, des médecins locaux qualifiés ont pris en charge le processus complexe de reconstruction des séquelles des brûlures.
« Les chirurgiens arméniens sont très compétents, mais la situation est critique en raison du grand nombre de patients, ce qui a eu un impact sur les ressources », a ajouté Gabriella Proietti.
L’équipe médicale d’urgence de Samaritan’s Purse
Samaritan’s Purse a également envoyé 11 experts en prise en charge des brûlures en Arménie, opérant à partir du Centre national des brûlures et de la dermatologie, pour renforcer les capacités de l’hôpital et dispenser des services de réadaptation, de chirurgie et de pansement des plaies.
Sasha Thew a dirigé l’équipe de Samaritan’s Purse basée aux États-Unis.
« Les médecins arméniens ont été incroyablement accueillants. Je sais que les 10 derniers jours ont été très difficiles, et il est donc très gratifiant de travailler à leurs côtés. J’espère que mon travail ici permettra aux patients de se rétablir le mieux possible. J’espère également que nous renforcerons les capacités du système de soins de santé ; que nous apporterons un soutien réel aux médecins et aux personnels infirmiers spécialisés dans les brûlures. »
La collègue de Sasha Thew, Jessica Burger, aide à la réadaptation des grands brûlés.
« S’occuper de ces patients est un honneur. Bien que parfois difficile mentalement et physiquement, c’est un privilège d’alléger la charge du système de santé local, et d’atténuer les souffrances de toutes les personnes que nous pouvons soigner », a expliqué Jessica Burger.
L’équipe médicale d’urgence d’UK-Med du Royaume-Uni
Avec le soutien du Bureau des Affaires étrangères, du Commonwealth et du Développement, UK-Med a envoyé une équipe de soins spécialisés pour contribuer à l’intervention en cours en Arménie. Une petite équipe de chirurgiens et de kinésithérapeutes exerce à l’hôpital Mikaelyan d’Erevan pour prodiguer des soins chirurgicaux et de réadaptation aux survivants.
L’OMS collabore étroitement avec le ministère arménien de la Santé et les équipes médicales d’urgence pour renforcer les capacités nationales en matière de réadaptation des brûlés. UK-Med et Samaritan’s Purse ont été des partenaires clés dans l’organisation d’un cours de formation intitulé « Équipes médicales d'urgence : formation des formateurs à la réadaptation des brûlés ».
« Cette formation reflète l’engagement du ministère arménien de la Santé à renforcer en permanence la réadaptation des grands brûlés. J’ai beaucoup apprécié de travailler aux côtés des participants à la formation et d’être témoin des compétences et de la compassion qu’ils apportent à leur travail », a expliqué le docteur April Gamble, responsable de la réadaptation pour UK-Med.
Soutenir les patients sur le long chemin de la guérison
Une fois l’opération terminée et la cicatrisation des brûlures entamée, les patients ont besoin d’une réadaptation intensive. Armenuhi Poghosyan est une thérapeute arménienne spécialisée dans la réadaptation au Centre national des brûlés et de la dermatologie.
« Lorsque les patients constatent les bienfaits de la réadaptation, à savoir la diminution de la douleur, une plus grande aisance et fluidité dans les mouvements, et la sensation de confort au niveau des membres, c’est alors qu’ils vous attendent et vous appellent », précise-t-elle.
La difficile réalité est que ce n’est que le début du long chemin vers la guérison pour beaucoup de ceux qui ont été gravement brûlés.
« Dans le cas des brûlures, la réadaptation est un processus de longue haleine qui peut durer jusqu’à 1 an, voire plus dans certains cas », explique Armenuhi.
À l’heure actuelle, 118 patients brûlés sont toujours pris en charge par le personnel médical de 8 hôpitaux d’Erevan.
L’OMS/Europe continuera à collaborer avec le gouvernement arménien au nom de ces patients, ainsi qu’à renforcer les soins de santé physique et mentale des réfugiés et des communautés d’accueil dans le cadre d’une réponse plus large à la crise des réfugiés.
L’OMS/Europe prépare un plan d’action dans le domaine des équipes médicales d’urgence pour 2024-2030, avec la contribution des États membres, afin de renforcer la préparation et la résilience des systèmes de santé aux situations d’urgence en intégrant les capacités de ces équipes dans les cadres nationaux.