Bonjour de la belle ville de Porto au Portugal !
Je voudrais tout d’abord remercier nos généreux hôtes, le gouvernement de la République portugaise, et en particulier le ministère de la Santé et mon ami, le ministre de la Santé, le docteur Manuel Pizarro, ainsi que le professeur Fernando Araujo, directeur exécutif du Service national de santé.
Obrigado pela parceria. (Traduction : Merci de votre partenariat.)
En sa qualité de leader et de pionnier dans le recours aux outils et interventions de santé numérique, le choix s’est naturellement porté sur le Portugal pour coorganiser ce Deuxième Colloque de l’OMS sur l’avenir des systèmes de santé numérique dans la Région européenne.
J’ai également le plaisir d’annoncer que nous venons de signer une lettre d’intention avec le gouvernement portugais en vue de l’ouverture d’un nouveau bureau de pays de l’OMS ici même à Porto. Le nouveau bureau sera notamment chargé d’un projet spécial sur les technologies de la santé et l’entreprenariat.
Je suis certain que mes homologues portugais en diront plus à ce sujet dans un instant.
Nous sommes à l’aube d’une révolution numérique dans le domaine de la santé.
Alors que nous nous dirigeons à pleine vitesse vers cet avenir numérique, nous devons nous poser plusieurs questions importantes.
Ses avantages seront-ils inclusifs ?
Nos données seront-elles en sécurité ?
Quel en sera l’impact sur le personnel de santé ?
Il est tout à fait évident que la santé numérique est le présent et l’avenir de nos systèmes de santé. Nous DEVONS donc veiller à ce qu’il n’y ait ni gagnants ni perdants, à ce que tout le monde en profite, et à ce que personne ne soit laissé de côté.
L’OMS/Europe lance aujourd’hui un nouveau rapport historique sur l’état de la santé numérique dans notre Région.
Ce rapport montre que, si des progrès considérables ont été accomplis ces dernières années dans le domaine de la santé numérique, des défis doivent être relevés et de graves lacunes doivent être comblées afin de libérer tout le potentiel des outils et des interventions numériques dans le but d’améliorer la santé et le bien-être en général, de réduire la charge pesant sur le personnel de santé, et de protéger la vie privée des personnes.
La Région européenne peut – et doit – jouer un rôle de chef de file en matière de santé numérique, car nous disposons d’une assise solide.
Notre rapport indique que la grande majorité des pays de la Région européenne disposent déjà d’une stratégie de santé numérique, utilisent une forme ou une autre de dossier médical électronique, et ont adopté une législation protégeant la confidentialité des données personnelles.
Or, notre analyse révèle également que seuls la moitié des pays de la Région européenne de l’OMS disposent de politiques visant à améliorer la littératie en santé numérique, laissant ainsi de côté des millions de personnes.
L’accès aux outils de santé numérique n’est utile que si l’on sait les utiliser.
Il est paradoxal de constater que les personnes dont les compétences numériques sont limitées ou inexistantes sont souvent celles qui ont le plus à gagner des outils et des interventions de santé numérique, comme les seniors, les personnes handicapées ou les populations rurales. Il est nécessaire de pallier ce déséquilibre pour assurer la transformation numérique du secteur de la santé.
Nous avons également constaté que si la pandémie de COVID-19 avait accéléré l’adoption des outils de santé numérique, celle-ci était inégale et se faisait souvent de façon ponctuelle plutôt que de manière stratégique à long terme.
Une tendance régulièrement observée est le manque de ressources pour le financement des activités cruciales de suivi et d’évaluation des interventions de santé numérique, celles-ci étant nécessaires à l’amélioration des modèles, des algorithmes et, finalement, des soins aux patients.
Seuls 19 pays ont en effet défini des orientations sur la manière d’évaluer les interventions de santé numérique.
Et avec l’essor rapide de l’intelligence artificielle et du big data, notre rapport montre que seuls 60 % des pays ont élaboré une stratégie de données réglementant l’utilisation du big data et de l’analytique avancée dans le secteur de la santé.
Pourtant, l’intelligence artificielle est en train de remodeler le monde tel que nous le connaissons, y compris les soins de santé. Elle permet des avancées sans précédent dans le domaine de la santé, qu’il s’agisse de diagnostics plus efficaces, de traitements plus sûrs ou d’une meilleure surveillance des maladies. Elle a le potentiel de renforcer la participation des patients à leurs propres soins, ainsi que d’accélérer la mise au point de nouveaux traitements pharmaceutiques et d’en réduire le coût.
Cependant, l’essor et l’adoption de l’intelligence artificielle doivent être soigneusement réglementés et gérés afin de garantir l’équité et la transparence, et cela doit se faire par consensus afin d’éviter un scénario dans lequel « le gagnant emporte tout ».
De quoi avons-nous besoin pour exploiter pleinement le potentiel de la santé numérique et adapter nos systèmes de santé au XXIe siècle ?
Premièrement, nous devons veiller à ce chaque foyer et chaque communauté de notre Région puisse bénéficier d’un accès haut débit fiable et peu coûteux. C’est une nécessité absolue.
Deuxièmement, les pouvoirs publics et les autorités sanitaires doivent commencer à considérer la santé numérique comme un investissement stratégique à long terme, plutôt que comme un luxe réservé à une minorité. Les investissements consentis aujourd’hui rapporteront demain.
Troisièmement, l’instauration de la confiance dans la santé numérique est fondamentale pour son adoption. Sans elle, c’est tout le système qui échoue. Nous ne pourrons mettre en œuvre avec succès les outils de santé numérique et lutter contre les inégalités numériques que si les patients, les citoyens et les professionnels de santé sont convaincus que leurs données sont sûres et sécurisées.
Enfin, et c’est peut-être le point le plus important, nous devons intensifier la collaboration internationale et le partage des connaissances. Les outils de santé numérique, notamment les dossiers électroniques des patients, doivent pouvoir « communiquer » entre eux au-delà des frontières nationales et internationales – ce que nous appelons l’interopérabilité – pour être rentables et efficaces.
En résumé : connectivité, investissement, confiance et coopération.
Si nous nous attaquons collectivement à ces 4 points, nous pourrons faire passer nos systèmes de santé numérique à la vitesse supérieure.
Je vous remercie. Obrigado.