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Un quart des adolescentes déclarent s’être senties seules la plupart du temps ou tout le temps au cours de l’année écoulée.
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Santé mentale en Europe et en Asie centrale : les filles se portent moins bien que les garçons

Une nouvelle enquête révèle qu’un quart des jeunes filles de 15 ans se sentent seules la plupart du temps ou en permanence, ce qui souligne la nécessité d’interventions adaptées aux femmes et aux jeunes filles en matière de santé mentale.

10 octobre 2023
Communiqué de presse
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Copenhague, 10 octobre 2023 

Selon un nouveau rapport d’enquête du Bureau régional de l’OMS pour l’Europe, publié aujourd’hui à l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, la santé mentale et le bien-être des adolescentes sont globalement moins bons que ceux des garçons. 

De plus, ces écarts s’aggravent avec l’âge : les plus mauvais résultats sont observés chez les adolescentes de 15 ans.

Ce rapport, « Focus on adolescent mental health and well-being in Europe and central Asia » [Pleins feux sur la santé mentale et le bien-être des adolescents en Europe et en Asie centrale] se base sur des statistiques de l’Enquête sur le comportement des enfants d’âge scolaire en matière de santé (HBSC) 2021-2022, laquelle étudie les comportements en matière de santé et le contexte social de près de 280 000 garçons et filles âgés de 11, 13 et 15 ans dans 44 pays d’Europe et d’Asie centrale.

Dans tous les cas, les résultats des filles sont moins bons que ceux des garçons (satisfaction à l’égard de la vie, bien-être mental, auto-évaluation de l’état de santé, solitude). Environ un quart des filles de 15 ans déclarent s’être senties seules la plupart du temps ou en permanence au cours de l’année écoulée, contre environ 1 garçon sur 7.

Une tendance durable 

Bien que l’on pense que la pandémie de COVID-19 et ses mesures d’endiguement ont joué un rôle, ce n’est pas la seule explication. En fait, la satisfaction à l’égard de la vie et l’état de santé auto-évalué des adolescents, en particulier des filles, déclinent depuis 2018, même avant la pandémie. Parallèlement, on observe depuis 2014 une augmentation du nombre de problèmes de santé multiples notifiés (insomnies, maux de dos ou de tête, sentiment d’abattement, etc.). 

Interrogée sur les résultats, une adolescente d’une école secondaire écossaise explique : « Je pense qu’il y a beaucoup de filles qui se dévalorisent parce qu’elles se demandent « Suis-je assez bien ? Suis-je assez forte ? Suis-je capable de faire des choses ? ». Elles se rabaissent et se culpabilisent pour un rien. Elles ne s’apprécient pas telles qu’elles sont. »

« Les défis auxquels sont confrontés les jeunes aujourd’hui sont divers et redoutables : cela va de la crise climatique au stress scolaire et aux attentes de la société, en passant par l’influence omniprésente des médias sociaux », déclare le docteur Hans Henri P. Kluge, directeur régional de l’OMS pour l’Europe. « Il est de notre responsabilité collective de veiller à ce qu’ils disposent du soutien et des ressources dont ils ont besoin pour relever ces défis avec succès. Pas plus tard que le mois dernier, le Bureau régional de l’OMS pour l’Europe a lancé le Réseau Youth4Health, qui permettra aux jeunes de s’asseoir à la table où se prennent les décisions relatives à leur santé et à leur bien-être. En cette Journée mondiale de la santé mentale, nous nous unissons pour souligner l’importance cruciale de la santé mentale des jeunes. »

L’enquête a également révélé qu’un tiers des adolescents se sont sentis nerveux ou irritables plus d’une fois par semaine au cours de ce dernier semestre. Ils sont 1 sur 4 à signaler des problèmes de sommeil (29 %) et/ou un sentiment d’abattement (25 %) ; 1 sur 5 (20 %) a signalé de fréquents maux de tête, plus d’une fois par semaine.

Ce rapport confirme également certains constats déjà anciens, à savoir que le statut socioéconomique est un indicateur de la santé mentale : l’état de santé général des adolescents issus de familles moins aisées est moins bon. 

Des interventions précoces, mettant l’accent sur l’école 

Ces conclusions soulignent l’importance d’une intervention précoce. Même si tous les adolescents qui se plaignent d’une mauvaise santé mentale n’ont pas besoin d’un traitement spécialisé, comme celui d’un psychiatre, ils risquent d’en avoir besoin un jour si ces plaintes ne sont pas prises en compte immédiatement. 

Pour ce faire, les écoles sont considérées comme un espace particulièrement important car, dans la plupart des pays, elles constituent le premier point de contact pour les adolescents confrontés à des problèmes de santé mentale. C’est en conférant aux écoles une place centrale dans des programmes de promotion et de prévention que l’on pourrait peut-être obtenir le meilleur retour sur investissement en faveur de la santé mentale de l’enfant et de l’adolescent.

Quant aux élèves qui ont besoin d’un soutien plus spécialisé, les écoles peuvent les orienter vers d’autres services de proximité, dont des hôpitaux et des centres de santé mentale locaux.

Une assise pour la santé et le bien-être dans leur globalité

La possibilité de surveiller l’état de santé mentale des enfants et des adolescents, par exemple au moyen des enquêtes HBSC, peut contribuer à mettre en lumière l’impact des activités nationales ou régionales visant à améliorer la santé mentale et le bien-être. 

« En présentant les tendances observées sur le long terme, l’enquête HBSC nous permet de suivre l’impact des changements sociétaux et du mode de vie personnel sur la santé des adolescents », déclare Jo Inchley, coordinatrice internationale de l’enquête HBSC. « Surtout, elle nous permet d’entendre les jeunes eux-mêmes s’exprimer sur les questions qui leur tiennent à cœur et sur les facteurs qui influencent leur santé et leur bien-être. Il y a beaucoup de problèmes à résoudre, mais les statistiques mettent aussi en évidence l’importance d’instaurer un contexte de sollicitude et de soutien, dans lequel les adolescents peuvent s’épanouir. »

« Les résultats de cette enquête sont préoccupants. Les jeunes nous disent qu’ils ne se sentent pas bien, et c’est à nous, en tant qu’adultes, en tant que décideurs, de les écouter et d’agir », conclut le docteur Kluge. « Notre enquête fait ressortir l’urgente nécessité de mettre en place des interventions mieux adaptées en faveur de la santé mentale des filles et des femmes, dans nos écoles, dans nos foyers et au sein de nos communautés. Et même si les garçons ne signalent pas autant de problèmes de santé mentale, ils doivent être sensibilisés à la manière de détecter les signes de détresse, d’anxiété ou de solitude, chez eux et chez les autres. Ensemble, nous pouvons faire en sorte que la santé mentale soit vraiment prise en compte partout dans notre Région. »