« L’été dernier, au plus fort de la flambée de variole du singe, on ne pouvait pas vraiment se concentrer sur autre chose, mais une fois que le nombre de cas a diminué, nous avons repris notre vie normale. Cependant, on s’est dit que ce n’était pas la fin de la variole du singe. On s’est dit que la maladie pourrait reprendre en 2023 ou dans 2 ou 3 ans, » explique Fabrice Pilorge, directeur du plaidoyer chez AIDES, une organisation qui mène la lutte contre le VIH/sida et les hépatites virales en France.
Que fait donc AIDES aujourd’hui, près d’un an après le pic de la flambée de variole du singe (ou monkeypox) dans la Région européenne de l’OMS, une flambée qui a principalement touché les homosexuels, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes ?
L’organisation, qui compte plus de 2 000 employés et bénévoles en France, s’attache à encourager les personnes vivant avec le VIH et les autres communautés concernées à recevoir leur deuxième dose de vaccin contre la variole du singe, ou à se faire vacciner si ce n’est pas encore le cas. Elle relance également le débat sur la variole du singe.
« Outre notre mandat, nous accordons une attention particulière aux personnes vivant avec le VIH, car elles courent un plus grand risque de maladie grave si elles contractent le virus de la variole du singe. C’est dans ce groupe [les personnes atteintes d’une infection à VIH non traitée et à un stade avancé] qu’il y a des décès et des complications sanitaires graves à prévenir, » explique Franck Barbier, responsable de programme chez AIDES.
« L’année dernière, on a vu des personnes souffrant de douleurs intenses, et on les a aidées à soulager leur douleur afin qu’elles n’aient pas à être hospitalisées. Cette année, nous rappelons aux gens de se protéger et de protéger les autres, de vérifier régulièrement la présence de symptômes, et de garder à l’esprit comment reconnaître les symptômes afin de pouvoir agir rapidement si nécessaire. »
Il ajoute : « nous ne sommes pas une association de médecins ou d’infirmiers, mais nous avons récemment organisé des cliniques de santé sexuelle et offert des conseils et des soins de santé aux personnes touchées par la variole du singe. »
Franck Barbier et ses collègues ont remarqué que l’intérêt pour les conseils et les soins de santé liés à la variole du singe s’est accru depuis le printemps, lorsque les demandes de vaccination ont recommencé à affluer.
AIDES a joué un rôle essentiel à cet égard en développant les services de vaccination et en les rapprochant des communautés concernées. Ces dernières peuvent d’ailleurs se faire vacciner dans environ 200 endroits différents en France. Il s’agit notamment d’hôpitaux et de cliniques de santé sexuelle, mais aussi de pharmacies et de centres AIDES dans les grandes villes.
Selon les données disponibles publiquement, avec plus de 160 000 personnes vaccinées en avril 2023, la France pourrait avoir vacciné le plus grand nombre de personnes en Europe contre la variole du singe.
Or, de nombreuses personnes présentant un risque élevé de contracter cette maladie ne sont toujours pas vaccinées. Avec l’augmentation des voyages internationaux et des événements susceptibles de donner lieu à des activités sexuelles cet été, les cas de variole du singe pourraient également augmenter. Les efforts déployés par AIDES afin de stimuler l’intérêt pour la vaccination et l’inoculation de la série complète de vaccins arrivent donc à point nommé.
Ouvrir la voie à l’éradication de la variole du singe
Le travail mené par AIDES en collaboration avec les autorités sanitaires françaises a donné lieu à de nombreuses initiatives qui ont contribué à faire baisser le nombre de cas de variole du singe depuis l’été dernier, et à le maintenir à un niveau bas depuis lors. Si rendre plus accessibles la vaccination contre la variole du singe, les conseils de santé adaptés et les soins s’est avéré essentiel à cet égard, c’est bien plus que cela.
Par exemple, pour aider les personnes souffrant de variole du singe à faire face à la solitude et à l’anxiété pendant une période d’auto-isolement de 21 jours, AIDES a mis en place le groupe Telegram l’été dernier, qui a permis d’atteindre quelque 500 personnes. Afin d’aider à maîtriser la propagation des infections par la variole du singe, AIDES a également créé un outil en ligne qui permet aux personnes infectées d’avertir, de manière anonyme, leurs partenaires sexuels et autres contacts d’une exposition potentielle à la variole du singe.
Même si la variole du singe n’est pas considérée comme une urgence de santé publique de portée internationale, AIDES ne se repose pas sur ses lauriers. En plus de relancer le débat sur la maladie, d’inciter les autorités sanitaires à faire de même cet été et cet automne, et d’encourager les communautés concernées à se faire vacciner, AIDES continue de collaborer avec les autorités sanitaires et l’OMS/Europe dans un projet à long terme visant à maîtriser et, finalement, à éliminer la variole du singe en France.
Campagne de l’OMS/Europe pour la maîtrise et l’élimination de la variole du singe
En juin 2022, l’OMS/Europe a réuni un groupe de travail informel pour élaborer conjointement des messages et des supports relatifs à la communication sur les risques, à la mobilisation des communautés et à la gestion de l’infodémie (CRMC-GI) en tenant compte des points de vue des communautés, et pour faire connaître les actions de mobilisation communautaire face à la flambée de variole du singe.
AIDES est l’une des 30 organisations de la société civile qui ont participé à l’élaboration de la boîte à outils CRMC-GI pour la variole du singe et de la note d’orientation sur l’élimination de la variole du singe, afin d’intégrer les points de vue des communautés dans les efforts de lutte et de partager des conseils pour atteindre les communautés touchées.
Le 17 mai 2023, à l’occasion du premier anniversaire de la riposte à la variole du singe dans la Région, l’OMS/Europe a lancé la campagne « Éliminer la variole du singe : placer les populations touchées au cœur de notre intervention » afin d’inciter les communautés concernées, les organisations de la société civile, les autorités sanitaires et les prestataires de soins à prendre des mesures pour lutter contre la variole du singe et l’éliminer dans la Région.
Cette campagne s’inspire de la dernière note d’orientation de l’OMS/Europe qui décrit les mesures que les pays de la Région doivent prendre pour se préparer à cette saison de rassemblements de masse et pour prévenir la propagation de la variole du singe à moyen et à long termes.
Il s’agit notamment de rendre le dépistage et la vaccination plus accessibles et de les rapprocher des communautés concernées, ainsi que d’intégrer la lutte contre la variole du singe dans les programmes nationaux de santé sexuelle – et AIDES et les autorités sanitaires françaises ont déjà montré que ces interventions sont en fait possibles.