Credit: OMS/T. Bayandor
Assise sous le porche de sa maison à Port Vila, Sera est l’une des plus de 25 000 personnes atteintes de diabète à Vanuatu, un État insulaire océanien. En moyenne, dans tout le pays, une personne sur onze vit avec cette maladie.
Le diabète est une maladie chronique qui se déclare lorsque le pancréas ne produit pas suffisamment d’insuline ou lorsque l’organisme n’est pas capable d’utiliser efficacement l’insuline qu’il produit. Il est une cause majeure de cécité, d’insuffisance rénale, d’accident vasculaire cérébral et d’amputation des membres inférieurs.
Sera ne voit plus de l’œil droit à cause de sa maladie. En outre, il n’est pas rare à Vanuatu que les personnes diabétiques soient amputées d’un membre inférieur.
Dans le pays en 2019, 61 personnes ont perdu une partie ou la totalité de leurs membres inférieurs après des amputations qu’il a fallu pratiquer car leur diabète n’était pas correctement maîtrisé. Ces opérations, qui mettent en grande difficulté les patients et leurs familles, sont largement évitables. Pour le Gouvernement de Vanuatu, il est inacceptable qu’elles soient aussi fréquentes.
Pourquoi est-il indispensable que l’insuline soit disponible et accessible ?
Avec une population dispersée sur 83 îles, les autorités cherchent depuis longtemps à atteindre chaque habitant vivant avec une maladie non transmissible, comme le diabète ; c’est un vrai défi logistique. Pour atteindre cet objectif, l’OMS a collaboré avec le Gouvernement de Vanuatu afin de mettre en place un ensemble d’interventions pour lutter contre les maladies non transmissibles au moyen du système de soins de santé primaires.
Baptisé « WHO PEN », cet ensemble d’interventions met en avant les meilleures pratiques en matière de soins aux personnes vivant avec un diabète de type 2 dans les milieux où les ressources sont limitées. Un accès fiable à l’insuline fait partie intégrante de l’approche pharmacologique recommandée ; l’observance du traitement administré par voie orale, l’activité physique et un régime alimentaire sain ne suffisent pas.
Traiter la problématique du diabète fait partie intégrante de la stratégie nationale mise en place au sein du secteur de la santé à Vanuatu. Outre les interventions relevant de WHO PEN, l’initiative « Fight Sik Suka » à l’échelle du pays cherche à réduire l’incidence et les conséquences du diabète au moyen de campagnes nationales sur les médias, de programmes pour des villages et des écoles en santé, et de mesures visant à accroître le dépistage à l’échelle communautaire.
Dans le cadre de ces actions, l’amélioration de l’accès à l’insuline est une pièce essentielle du puzzle. Lorsqu’on lui demande pourquoi l’insuline est importante dans le cadre de ses soins, Sera n’hésite pas : « Le diabète fait des dégâts dans mon corps. Mais je sais que c’est l’insuline qui me garde en vie. » Le médicament la pousse également à tenir compte d’autres aspects de sa santé : « Maintenant que je dépends de l’insuline, je dois savoir ce que je mange et comment je peux survivre chaque jour. »
Credit: OMS/T. Bayandor
À l’autre bout de la ville, Rose est une autre habitante de Vanatu qui a besoin d’être continuellement prise en charge par les services de santé voisins en raison de son diabète. Les visites fréquentes à l’hôpital sont ce qui lui pose le plus de problème. Même si la possibilité pour les malades de contrôler eux-mêmes leur glycémie n’est qu’un élément de la prise en charge du diabète, pour Rose, disposer de l’équipement à domicile pour pouvoir être autonome changerait les choses : « Pour pouvoir rester à la maison et me tester moi-même, j’ai besoin d’un appareil qui contrôle la glycémie. Sinon, je dépense une grande partie de mon budget en tickets de bus pour venir à l’hôpital. Si on pouvait me donner un appareil, j’aimerais vraiment qu’on me montre comment l’utiliser. »
Pour Sera, les visites au centre de santé engendrent une autre difficulté : la fatigue. « Quand je me rends au centre des maladies non transmissibles, je me fatigue vraiment et je dois m’agripper à la personne qui s’occupe de moi pour qu’elle me fasse avancer. Je m’épuise et la seule chose que j’espère, c’est de pouvoir recevoir mon traitement chez moi. »
L’approvisionnement en médicaments est essentiel. Comme nous le dit Rose, en raison de la demande d’insuline dans tout le pays, elle ne peut obtenir que de petites quantités à chaque fois : « Si on pouvait me donner plusieurs bouteilles d’insuline à la fois, ma vie serait beaucoup plus simple. Le médicament fonctionne, mais je ne peux en ramener qu’une petite quantité à chaque visite, l’équivalent d’à peu près un mois de traitement. Ils ne peuvent pas m’en donner plus parce que beaucoup de monde prend ce médicament. L’idéal serait d’avoir plus de réserves. Comme ça, je pourrais rester à la maison et faire des économies plutôt que d’avoir à aller et venir sans cesse. »
Les témoignages de Sera et de Rose mettent en lumière pourquoi il est si important qu’un système robuste de soins de santé primaires intègre la prise en charge des maladies non transmissibles. Garantir un accès équitable et local aux médicaments peut permettre de mieux prendre en charge les patients et d’avoir moins besoin de recourir à des traitements onéreux pour prendre en charge des complications douloureuses.
Même si la vie d’une personne diabétique est semée d’embûches, Sera reste positive : « Quelles que soient les conséquences du diabète sur ma vie, je dois de toute façon les accepter. Je profite de la vie. J’ai intérêt de ne pas laisser le diabète gagner mes doigts. Je dois le prendre à bras-le-corps et considérer chaque journée comme un cadeau. »