Éthique de la surveillance de la santé publique

1 août 2024 | Questions & réponses

La surveillance de la santé publique consiste en la collecte, l’analyse et l’interprétation continues et systématiques des données relatives à la santé pour planifier, mettre en œuvre et évaluer les pratiques de santé publique. La surveillance de la santé publique, qui a un caractère permanent, sert à contrôler les tendances des maladies et joue également un rôle essentiel dans la lutte contre les épidémies. Elle peut être effectuée à l’aide d’enquêtes en porte-à-porte, d’enquêtes en ligne, de registres de maladies ou encore de données des laboratoires. Les données provenant des réseaux sociaux, les données génétiques et les données ne concernant pas la santé provenant de sources diverses sont parmi les nouveaux outils actuellement utilisés ou envisagés à des fins de surveillance de la santé publique.

Pour être efficace, la surveillance de la santé publique destinée à endiguer la propagation des maladies doit reposer sur la confiance. En effet, les personnes dont les données sont collectées doivent être sûres que celles-ci seront utilisées pour protéger leur santé. Si elles n’ont pas confiance, les personnes n’accepteront pas de communiquer leurs données, ou elles communiqueront des données qui ne seront pas fiables. La surveillance de la santé publique, conduite de manière à anticiper les problèmes éthiques et visant, par des mesures proactives, à réduire les risques inutiles, permettra de gagner durablement la confiance des populations touchées.

Les organismes ou les organisations qui effectuent la surveillance de la santé publique devraient tenir compte des valeurs, des préoccupations et des priorités des communautés de manière transparente. Il est impossible d’obtenir l’adhésion des communautés si ces dernières ne peuvent pas connaître les avantages et les risques (ou les préjudices potentiels) de la surveillance. La mobilisation des communautés peut passer par des réunions avec les dirigeants communautaires, des discussions de groupe et d’autres rencontres qui donnent aux membres l’occasion de faire part clairement de leurs valeurs et de leurs préoccupations. Quoi qu’il en soit, il est essentiel que le processus décisionnel soit transparent, équitable et puisse être révisé. L’inclusion et la participation actives des communautés favorisent la confiance et créent les conditions permettant aux citoyens de promouvoir le bien commun individuellement et collectivement.

Les principales valeurs sur lesquelles repose l’éthique de la recherche sont l’autonomie, le respect de la vie privée et la confidentialité. En revanche, l’éthique de la surveillance de la santé publique est axée sur le bien commun, la solidarité, la responsabilité, la confiance et l’équilibre entre les droits individuels et les intérêts collectifs.

Les dossiers qui servent à la surveillance comportent parfois des informations qui permettent d’identifier les personnes, comme le nom et l’adresse. L’utilisation d’identifiants uniques, tels que des chiffres, à la place des noms permet d’éviter la divulgation involontaire de l’identité des personnes. Le masquage géographique permet aussi de conserver des informations vitales sur la répartition géographique des cas, sans indiquer exactement où se trouvent les foyers épidémiques. L’évaluation des protections juridiques pour les personnes particulièrement susceptibles d’être exposées à des préjudices est une autre façon de s’assurer que des mesures de protection efficaces sont en place avant d’instaurer la surveillance. Dans de nombreux pays, les lois exigeant une surveillance sont assorties non seulement de mesures de sécurité, mais aussi de protections claires des droits économiques, sociaux et civils.

Dans les situations d’urgence, il est impératif de communiquer rapidement les données. Il faut aussi communiquer des données de santé publique à des fins de recherche légitimes, après approbation par un comité d’éthique. Mais les données collectées à des fins de santé publique ne doivent jamais être communiquées dans le but de prendre des mesures contre les personnes ou à des fins autres que la santé publique. L’accès des organismes responsables de la sécurité nationale, de l’application des lois ou de l’attribution des prestations sociales à des données personnelles ne devrait être autorisé, d’une manière générale, qu’à l’issue d’une procédure juridique régulière. Pour préserver la confiance dans les systèmes de surveillance de la santé publique, la communication de ce type de données à des fins autres que la santé publique devrait être dûment justifiée.

Un organisme de contrôle peut aider à cerner les problèmes d’éthique lorsqu’ils se présentent, à tenir compte des nouvelles données probantes ou de nouvelles bonnes pratiques et à traiter les problèmes épineux de manière responsable et transparente. Les décisions qui peuvent nécessiter un contrôle éthique sont, par exemple, la collecte de données révélatrices d’une stigmatisation ; l’adoption de nouvelles utilisations des données de surveillance existantes, comme la prise en charge des cas ou la recherche des contacts ; ou encore l’utilisation des données issues de la surveillance de la santé publique à des fins commerciales ou de sécurité. Le contrôle est également important pour assurer la surveillance active des préjudices et de la communication appropriée des données. Mais les mécanismes de contrôle éthique peuvent également contribuer au respect par les États de leurs obligations en matière de surveillance responsable.