Tuberculose ultrarésistante
23 mai 2024 | Questions & réponses
La tuberculose ultrarésistante est une forme de tuberculose causée par une souche du complexe M. tuberculosis résistante à la rifampicine (et parfois également à l’isoniazide), et qui est aussi résistante à au moins une fluoroquinolone (la lévofloxacine ou la moxifloxacine) et à au moins un autre médicament du groupe A (la bédaquiline ou le linézolide).
Bien qu’il existe des protocoles thérapeutiques relativement courts pour la tuberculose multirésistante, le traitement de la tuberculose ultrarésistante est généralement plus long et le risque de toxicité est souvent plus élevé. Ce risque accru découle de facteurs tels qu’une exposition prolongée aux médicaments, une intolérance plus élevée, des effets indésirables et un plus grand risque d’interactions médicamenteuses, en particulier chez les patients gravement malades. En outre, certains des protocoles thérapeutiques relativement courts qui sont efficaces contre la tuberculose multirésistante ne sont pas applicables aux patients atteints de tuberculose ultrarésistante.
La tuberculose ultrarésistante peut survenir de deux façons. Elle peut survenir chez un patient qui reçoit un traitement contre la tuberculose active et elle est généralement due à des soins cliniques inadaptés ou à un mauvais usage des médicaments antituberculeux. Cela peut se produire lorsque les patients ne sont pas correctement épaulés pour prendre leur traitement jusqu’au bout, lorsque les dispensaires qui délivrent les médicaments sont approvisionnés de façon irrégulière ou lorsque les médicaments sont de mauvaise qualité.
La tuberculose ultrarésistante peut aussi survenir en cas de transmission par un patient déjà atteint de la maladie. Les patients atteints de tuberculose pulmonaire peuvent transmettre la maladie en toussant, en éternuant ou simplement en parlant. L’inhalation d’une petite quantité de bacilles suffit pour contracter l’infection. Cependant, seule une faible proportion des personnes infectées par le bacille tuberculeux contractent la maladie.
Des études semblent indiquer que le risque de transmission est probablement le même pour la tuberculose ultrarésistante et pour toute autre forme de tuberculose. La propagation du bacille tuberculeux dépend de facteurs tels que le nombre et la concentration de personnes infectieuses dans un même endroit et la présence de personnes présentant un risque plus élevé d’infection (comme les personnes vivant avec le VIH).
Plus une personne indemne passe de temps dans la même pièce qu’une personne infectée, plus la probabilité d’être infecté augmente. Le risque de propagation augmente en cas de forte concentration de bacilles tuberculeux, par exemple dans des environnements mal ventilés, comme les logements surpeuplés, les hôpitaux ou les prisons. Le risque de propagation est réduit si les patients infectieux reçoivent rapidement un traitement approprié.
Bien que les patients atteints de tuberculose ultrarésistante puissent être aussi contagieux que ceux atteints de tuberculose pharmacosensible, le risque de contracter la tuberculose ultrarésistante est plus faible car cette forme de la maladie est plus rare. Les mesures à prendre sont les mêmes que celles appliquées pour prévenir la tuberculose pharmacosensible.
Il faut éviter les contacts étroits avec les patients atteints de tuberculose infectieuse, en particulier dans les espaces mal ventilés. Le risque de contracter la tuberculose est très faible en plein air. Les patients atteints de tuberculose doivent être incités à respecter les règles hygiène en cas de toux, par exemple à se couvrir la bouche avec un mouchoir voire à porter un masque chirurgical aux premiers stades du traitement, en particulier dans les lieux fermés mal ventilés.
Le plus important est que les soignants et la communauté fournissent tous les moyens (informations, conseils et soutien matériel) permettant aux patients de continuer à prendre tous leurs traitements tels qu’ils ont été prescrits.
Aucune dose ne doit être oubliée et, surtout, le traitement doit être pris jusqu’au bout. Si un patient ressent des effets indésirables, il doit en informer son médecin ou son infirmier/infirmière, car il existe souvent une solution simple pour y remédier. S’ils voyagent pour une raison quelconque, les patients doivent emporter suffisamment de comprimés pour la durée de leur déplacement.
Les patients atteints de tuberculose ultrarésistante peuvent être guéris, mais avec les médicaments actuellement disponibles, les chances de guérison sont beaucoup plus faibles que chez les patients atteints de tuberculose pharmacosensible ou même de tuberculose multirésistante. La guérison dépend de l’importance de la pharmacorésistance, de la gravité des manifestations de la maladie et de l’état du système immunitaire.
La mortalité peut être plus élevée en cas d’infection à VIH. Un diagnostic précoce et précis est important pour instaurer un traitement efficace le plus tôt possible.
Les programmes nationaux de lutte contre la tuberculose, en collaboration avec tous les services de santé, peuvent prévenir la tuberculose ultrarésistante en veillant à ce que tous les praticiens impliqués dans la prise en charge suivent les dernières recommandations de l’OMS relatives au traitement de la tuberculose pharmacorésistante. Celles-ci soulignent qu’il est important de poser un diagnostic correct et d’instaurer un traitement approprié pour tous les patients atteints de tuberculose, y compris de sa forme pharmacorésistante ; d’assurer un approvisionnement régulier et rapide pour tous les médicaments antituberculeux ; de veiller à une bonne gestion des médicaments antituberculeux et d’apporter une aide aux patients pour optimiser l’observance des traitements prescrits ; de prendre en charge les cas de tuberculose multirésistante ou ultrarésistante dans des services bien ventilés et d’éviter autant que possible les contacts avec les autres patients, en particulier ceux qui vivent avec VIH, surtout aux premiers stades du traitement, avant que celui-ci n’ait permis de réduire l’infectiosité.
Le BCG prévient les formes graves de tuberculose chez les enfants, par exemple la méningite tuberculeuse, mais il est moins efficace pour prévenir la tuberculose pulmonaire chez les adultes, qui est la forme la plus courante et la plus infectieuse de tuberculose. Le BCG devrait être aussi efficace contre la tuberculose ultrarésistante que contre la tuberculose pharmacosensible. Néanmoins, l’OMS plaide activement en faveur de la mise au point de nouveaux vaccins de toute urgence.
En raison de l’affaiblissement de leur système immunitaire, les personnes vivant avec le VIH risquent davantage que les personnes séronégatives de contracter la tuberculose, y compris la tuberculose ultrarésistante. Dans quelques endroits où des souches ultrarésistantes du bacille tuberculeux circulent plus fréquemment, les personnes vivant avec le VIH risquent donc plus qu’ailleurs de contracter la tuberculose ultrarésistante. À ce jour, la tuberculose ultrarésistante ne s’est pas propagée dans la plupart des endroits où les taux d’infection à VIH sont élevés.
La majorité des personnes vivant avec le VIH qui contractent la tuberculose présenteront donc des formes pharmacosensibles qui pourront être traitées à l’aide de médicaments antituberculeux de première intention. Chez les personnes porteuses du VIH, le traitement antirétroviral réduira probablement le risque de contracter une tuberculose ultrarésistante, tout comme une tuberculose pharmacosensible. Le risque de décès est élevé chez les patients atteints à la fois de tuberculose ultrarésistante et d’une infection à VIH qui ne reçoivent pas de médicaments antirétroviraux.
La tuberculose ultrarésistante ne peut être diagnostiquée que dans un laboratoire bien équipé. Les symptômes de la tuberculose ultrarésistante sont les mêmes que ceux de la tuberculose pharmacosensible : toux accompagnée de mucus (expectorations) épais et trouble, parfois mêlé de sang, pendant plus de deux semaines ; fièvre, frissons et sueurs nocturnes ; fatigue intense et faiblesse musculaire ; amaigrissement ; et dans certains cas, essoufflement et douleurs thoraciques. Si vous présentez ces symptômes, cela ne signifie pas que vous avez une tuberculose ultrarésistante.
Mais vous devez vous faire examiner par un médecin. Si vous suivez déjà un traitement contre la tuberculose et qu’au moins certains de ces symptômes ne s’estompent pas au bout de quelques semaines, vous devez en informer votre médecin ou votre infirmier/infirmière.
Si des bacilles tuberculeux sont présents dans les expectorations, la tuberculose peut être diagnostiquée en un jour ou deux. Cependant, la confirmation d’une tuberculose ultrarésistante peut prendre 6 à 16 semaines.
La tuberculose ultrarésistante est encore très rare mais sa présence a été avérée dans de nombreux pays. Les sujets les plus à risque s’ils entrent en contact avec une personne atteinte de tuberculose ultrarésistante sont ceux qui présentent un déficit immunitaire, comme les personnes vivant avec le VIH, ou d’autres pathologies susceptibles d’affaiblir le système immunitaire.
Il est conseillé à ces personnes d’éviter les régions où aucune mesure de lutte anti-infectieuse n’est appliquée. Au cours des voyages en avion, les risques de contracter la tuberculose, quelle qu’en soit la forme, sont très faibles. Les voyageurs concernés doivent demander conseil à leur médecin, contacter les autorités nationales ou consulter des sites Web fiables sur les voyages, tels que la page Voyages et santé du site de l’OMS.
Toute personne qui a été en contact avec un cas connu ou présumé de tuberculose ultrarésistante doit consulter son médecin ou se rendre dans un dispensaire local et se faire dépister. C’est particulièrement important en présence de symptômes de tuberculose. En cas de toux, il faudra fournir un échantillon d’expectorations, pour une recherche du bacille tuberculeux.
Si la tuberculose est confirmée, le traitement doit être instauré en tenant compte des résultats de l’antibiogramme. S’il existe des preuves d’infection par le bacille tuberculeux mais s’il n’y a pas de symptômes, un traitement préventif peut être administré ou la personne peut simplement être invitée à se rendre périodiquement dans un établissement de santé pour un examen.
Les patients chez qui on soupçonne une tuberculose ou une tuberculose ultrarésistante sont parfois hospitalisés pour confirmer le diagnostic. Après l’instauration d’un traitement approprié, l’isolement est généralement inutile.
L’isolement joue un rôle très limité chez les patients pour qui le traitement a échoué. Des études ont montré que le traitement des patients tuberculeux à domicile ne présente généralement pas de risque important pour les autres membres du ménage si les mesures de lutte anti-infectieuse appropriées sont prises. Au moment où un diagnostic est posé, les contacts familiaux ont déjà été exposés à l’infection.
Cependant, faute de possibilités de traitement curatif, toutes les mesures de lutte anti-infectieuse doivent être renforcées à domicile. Lorsque cela n’est pas possible, il faut pouvoir proposer au patient des moyens de s’isoler volontairement et des soins palliatifs et de fin de vie.
Pour protéger les soignants susceptibles d’entrer en contact avec des patients atteints de tuberculose infectieuse, des mesures de lutte anti-infectieuse strictes doivent être mises en œuvre en permanence dans les établissements de santé. Les soignants sont aussi invités à vérifier leur statut sérologique pour le VIH afin de limiter le risque d’exposition.
Premièrement, l’OMS veille à ce que les autorités sanitaires responsables de la prise en charge de la tuberculose et du soutien aux patients reçoivent les dernières informations sur la tuberculose ultrarésistante. Ces informations et celles concernant d’autres questions pertinentes relatives à la tuberculose sont régulièrement publiées sur le site Web du Programme mondial de lutte contre la tuberculose de l’OMS.
Deuxièmement, l’OMS souligne que la prévention, la prise en charge et le soutien évitent en premier lieu l’apparition d’une pharmacorésistance et qu’un traitement approprié de la tuberculose multirésistante ou résistante à la rifampicine évite la survenue d’une tuberculose ultrarésistante.
Troisièmement, l’OMS met régulièrement à jour ses orientations à l’intention des ministères de la santé sur les politiques de traitement et de diagnostic de la tuberculose pharmacorésistante.
Informations supplémentaires
- Comité Feu vert (en anglais)
- Airborne: a journey into the challenges and solutions to stopping MDR-TB and XDR-TB (en anglais)
- WHO consolidated guidelines on tuberculosis: module 4: treatment: tuberculosis care and support (en anglais)
- WHO operational handbook on tuberculosis: module 3: diagnosis: rapid diagnostics for tuberculosis detection, 3rd ed (en anglais)
- WHO consolidated guidelines on tuberculosis: module 3: diagnosis: rapid diagnostics for tuberculosis detection, 3rd ed (en anglais)
- WHO operational handbook on tuberculosis. Module 4: treatment - drug-resistant tuberculosis treatment, 2022 update (en anglais)
- Guidance on conducting reviews of tuberculosis programmes (en anglais)
- Co-administration of treatment for drug-resistant tuberculosis and hepatitis C: rapid communication (en anglais)
- Global tuberculosis report 2023 (en anglais)
- Adaptation and implementation of WHO’s multisectoral accountability framework to end TB: operational guidance (en anglais)