Dans son enfance, le Dr Msafiri Kabulwa rêvait de devenir ingénieur électricien. Cependant, en l’absence d’enseignant de mathématiques avancées dans son lycée en République-Unie de Tanzanie, il s’est orienté vers la physique, la chimie et la biologie, avec l’ambition de devenir enseignant. Il a finalement intégré la faculté de médecine, obtenu son diplôme de chirurgien-dentiste, puis été affecté comme tuteur auprès de thérapeutes dentaires, alliant ainsi ses nouvelles compétences médicales à sa vocation initiale pour l’enseignement.
« Dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire, il n’y a pas suffisamment de personnel de santé, en particulier d’ergothérapeutes et de physiothérapeutes, qui sont souvent concentrés dans les zones urbaines, loin des populations vivant dans les petites villes et les villages ruraux », explique le Dr Kabulwa. « Je savais qu’une partie de la solution devait consister à former des agents de santé non spécialisés, qui représentent le premier point de contact pour les populations : infirmières, cliniciens, travailleurs sociaux, entre autres. »
En 2022, en tant que Coordinateur des soins aux personnes âgées et aux personnes handicapées à la Direction des services curatifs du ministère de la Santé, le Dr Kabulwa a lancé un projet ambitieux, en collaboration avec HelpAge Tanzanie et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). L’objectif était de renforcer les capacités des agents de santé communautaires et des prestataires de soins de santé primaires dans deux districts de la région de Morogoro, afin qu’ils puissent jouer un rôle dans les technologies d’assistance, en utilisant la ressource d’apprentissage hybride Learning on TAP de l’OMS.
« Pour de nombreux prestataires de soins de santé primaires, c’était la première expérience d’apprentissage en ligne. Mais maintenant que la plupart disposent d’un smartphone, les cours ne nécessitaient pas beaucoup de ressources et permettaient d’apprendre directement dans leur environnement de travail », souligne le Dr Kabulwa.
Dans la Région Afrique de l’OMS, le nombre de personnes ayant besoin d’au moins un produit d’assistance - comme des aides auditives, des cannes ou des lunettes de presbytie - dépasse aujourd’hui 200 millions, et devrait doubler d’ici 2050. Pourtant, seuls 15 à 25 % des personnes qui en ont besoin y ont effectivement accès.
Disponible sur la plateforme d’apprentissage en ligne de l’Académie de l’OMS, Learning on TAP adopte une approche en quatre étapes - apprentissage en ligne, apprentissage en présentiel, pratique mentorée et pratique autonome - visant à renforcer les capacités du personnel de santé dans les établissements de soins de santé primaires et dans les communautés, afin d’améliorer l’accès aux services de santé au plus près du domicile des populations.
« L’implication de mentors et d’organisateurs pairs a été déterminante, car ils peuvent aider et orienter les apprenants bien au-delà de la formation initiale. Les apprenants ont désormais contribué à instaurer des voies d’orientation depuis la communauté vers les centres de santé primaires et les hôpitaux de district - un élément essentiel pour la future fourniture de produits d’assistance », note le Dr Kabulwa.
Dans le cadre du projet, 179 agents de santé des niveaux primaire et communautaire ont été formés pour jouer un rôle dans les technologies d’assistance, et près de 15 000 produits d’assistance ont été fournis dans 31 établissements de santé. Après la formation, on a observé une augmentation de 45 % du nombre de personnels des centres de santé impliqués dans la fourniture de technologies d’assistance.
De manière cruciale, le projet a permis d’identifier quels produits d’assistance étaient nécessaires et à quels niveaux du système de santé, posant ainsi les bases d’une future gestion de la chaîne d’approvisionnement. Il a également mis en évidence la nécessité d’intégrer les produits d’assistance dans les listes nationales des produits de santé essentiels pour les soins de santé primaires. La formation et les ressources Learning on TAP ont également été testées dans d’autres pays - notamment les Fidji, l’Inde, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, la Roumanie, l’Arabie saoudite, le Tadjikistan et l’Ukraine - démontrant que l’approche hybride peut être adaptée à différents contextes, conformément aux normes et orientations mondiales de l’OMS.
« Notre expérience dans seulement deux districts nous a donné les connaissances et les données nécessaires pour adopter une approche nationale de la fourniture de technologies d’assistance », affirme le Dr Kabulwa. « Des solutions durables de formation et d’apprentissage en santé existent - et travailler avec l’OMS peut vous aider à identifier l’approche adaptée à votre pays. »