Monsieur le Président, Excellences, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les délégués, Dr Shin, Mesdames et Messieurs,
C’est avec grand plaisir que je m’adresse aux pays de la Région du Pacifique occidental pour célébrer vos nombreuses réussites et savoir de quelle façon vous prévoyez de vous attaquer aux nouveaux problèmes et d’accélérer la résolution de ceux qui subsistent.
Cette Région se compose d’économies avancées et d’économies en difficultés, de pays les plus peuplés au monde et des plus petites nations insulaires. Et pourtant, les pays de cette Région sont unis par les améliorations régulières qu’ils ont réalisées en commun dans le domaine de la santé.
Vous vous aidez mutuellement et vous vous serrez les coudes lorsqu’il s’agit de la santé. Vous et votre Directeur régional, vous pouvez être fiers de ce que vous avez réalisé. Depuis toujours, cette Région, c’est chez moi et votre fierté est aussi mienne.
La Région du Pacifique occidental est toujours exempte de poliomyélite. La flambée de 2011 qui s’est déclarée en Chine a été soudaine et a pu être endiguée. Cette rechute potentielle nous rappelle qu’aucun pays ni aucune région ne sera sûre tant que le virus ne sera pas entièrement éradiqué du monde.
L’épidémie de VIH est stabilisée et a commencé à décliner. Près de la moitié des personnes pouvant bénéficier d’une thérapie antirétrovirale en bénéficient, ce qui représente une augmentation de 16 % de la couverture thérapeutique en une année. Les programmes sont adaptés conformément à l’usage recommandé de la thérapie antirétrovirale, qu’elle soit à des fins préventives ou thérapeutiques.
La Région est en bonne voie d’atteindre l’objectif du Millénaire pour le développement relatif à la tuberculose. Les cas de paludisme et les décès qui en résultent sont en baisse. Pour ces deux maladies, la résistance aux antimicrobiens est un problème inquiétant qui doit être suivi de près. La perspective d’éliminer la filariose lymphatique semble bonne.
La plupart des pays ont obtenu d’importantes réductions dans le nombre de décès de mères et d’enfants. Dans certains pays, cette baisse a été remarquable, grâce aux innovations pouvant servir de modèle dans d’autres endroits du monde.
Vous allez examiner un projet de plan d’action en faveur de nouveau nés en bonne santé. Ce plan est le premier de ce type dans une Région de l’OMS. Il illustre une tendance que je soutiens de tout cœur, c’est à dire l’utilisation d’interventions très simples, d’un bon rapport coût efficacité, capables de sauver des vies.
Ce plan attire l’attention sur un certain nombre de pratiques courantes mais inadaptées et inutiles, et son but est de les corriger. Il introduit le principe important de la première étreinte et montre comment, par un simple changement dans la séquence des soins aux nouveau nés, on peut sauver des vies.
Comme on le sait bien dans la Région, les systèmes de santé ont besoin de faire un bien meilleur travail de comptage des naissances et des décès. Les violations du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel sont monnaie courant et cela doit changer. Le Règlement sanitaire international fonctionne bien. On l’avait déjà constaté plus tôt dans l’année lors de l’émergence du nouveau virus H7N9 en Chine.
Dix ans en arrière, rares sont ceux qui se seraient attendus à voir une majorité de chercheurs cliniciens, virologistes et épidémiologistes chinois dans les pages du New England Journal of Medicine. Tous les pays du monde peuvent être reconnaissants à la Chine de sa vigilance, de la rapidité de sa réaction, d’avoir immédiatement partagé les virus et de sa communication constante d’informations.
Dans cette Décennie des vaccins, vos pays démontrent le pouvoir de prévention de la vaccination des enfants sur une grande échelle. Ces quatre dernières années, le nombre de cas de rougeole a diminué de 93 %. La Région dans son ensemble a presque atteint son objectif d’interrompre la transmission. Vous êtes prêts et la commission de vérification est en place.
De tous temps, cette Région a enregistré les taux les plus élevés de maladies du foie dans le monde. Aujourd’hui contre l’hépatite B, vous enregistrez la plus large couverture vaccinale au monde.
Le fait que 96 % des enfants de la Région soient protégés par trois doses de vaccin est stupéfiant. Et les acquis le sont tout autant puisqu’ils devraient prévenir près de 10 millions d’infections chroniques et 2,5 millions de futurs décès dus à l’hépatite B. Vous avez constitué un groupe d’experts chargé de procéder à une vérification indépendante des progrès des pays. Cela donne confiance et répond à la nécessité de transparence. Vous allez envisager des objectifs encore plus ambitieux de protection contre l’hépatite B. Le fait de viser très haut pour la prestation de services intégrés conduira à d’autres améliorations.
Atteindre un plus grand nombre de nourrissons dans les 24 heures qui suivent la naissance exige qu’un plus grand nombre de mères accouchent dans des établissements de santé et que l’on parvienne à une plus large couverture de naissances en présence d’accoucheuses qualifiées. Ce progrès, à son tour, contribuera à réduire les décès maternels et néonatals, sachant que la plupart des décès de nourrissons dans la Région surviennent au cours des trois premiers jours de vie.
En Chine et au Viet Nam, les mesures visant à étendre la protection contre l’hépatite B ont été associées aux campagnes d’élimination de la transmission mère enfant du VIH et de la syphilis congénitale.
Toutes ces réalisations libèrent des ressources et des lits d’hôpital et permettront ainsi d’agir lorsque surviendra la prochaine vague de problèmes, notamment ceux qui ont fait de cette Région l’épicentre des maladies chroniques non transmissibles.
Mesdames et Messieurs,
Les deux points les plus importants de notre ordre du jour, les maladies non transmissibles et le vieillissement des populations sont, dans une certaine mesure, le prix à payer pour la rapidité de la croissance économique et de la modernisation de la Région. Et rien n’illustre mieux ce constat que la situation des îles du Pacifique confrontés aux maladies non transmissibles et celle de la Chine confrontée au diabète.
Il y a juste 50 ans, les maladies non transmissibles n’étaient pas une priorité dans les îles du Pacifique. L’alimentation était riche en fruits et en légumes. Le poisson était la principale source de protéines. Les gens buvaient de l’eau.
Dans un temps très court, le pain blanc, le riz blanc, le sucre blanc, les boissons sucrées et les aliments transformés, notamment les viandes en conserve, ont été introduits dans l’alimentation. Aujourd’hui, les États et Territoires insulaires du Pacifique enregistrent les taux d’obésité les plus élevés au monde, jusqu’à 75 % dans certains endroits.
Ailleurs dans la Région, le changement des modes de vie et l’augmentation du pouvoir d’achat ont pour conséquences un plus grand nombre de femmes qui travaillent, moins de femmes qui allaitent leurs nouveau nés, des repas pris moins souvent au domicile, la consommation accrue de malbouffe, d’alcool et par dessus tout, de tabac. Cette Région compte 430 millions de fumeurs.
Votre plan d’action régional souligne avec justesse la nécessité de mesures de prévention et avertit de façon appropriée des dangers de la commercialisation des boissons et aliments malsains pour les enfants.
L’OMS n’adressera jamais la parole à l’industrie du tabac. Je ne suis pas contre une collaboration avec les industries productrices d’aliments, de boissons et d’alcool mais avec deux réserves incontournables.
Premièrement, ces industries ne doivent pas toucher ou chercher à influencer en aucune manière la formulation des normes et des politiques visant à protéger la santé du public. Deuxièmement, leurs comportements doivent être suivi étroitement et avec discernement. Elles font beaucoup de promesses mais est ce qu’elles les tiennent ?
La plus grande crainte de ces entreprises est la réglementation de leurs produits, pour des raisons sanitaires justifiées. Les pays qui choisissent cette voie doivent s’attendre à une résistance, bien financée et bien orchestrée.
Regardez ce qu’a traversé l’Australie avec sa législation rendant obligatoire le conditionnement simple des produits du tabac. Regardez l’armée des groupes de pression puissants employés au début de ce mois pour mettre en échec la Directive de l’Union européenne contre le tabac.
Votre plan d’action tire une sonnette d’alarme opportune : « Les accords de commerce ne doivent pas entraver les mesures de santé publique visant à protéger les populations des maladies non transmissibles. » Soyez sûrs que la santé à une place à la table des négociations lorsque les ministres du commerce et des finances discuteront d’accords commerciaux.
Mes chers ministres de la santé, si vous n’êtes pas à la table des négociations, au moins êtes vous au menu.
Trop souvent, tous les yeux sont tournés vers les victoires économiques à court terme mais on ferme les yeux sur les coûts et les conséquences des maladies non transmissibles. Lorsque cela se produit, les économies peuvent progresser dans un sens où la charge de ces maladies annule les effets bénéfiques du gain économique.
Le mois dernier, les chercheurs chinois ont publié les résultats d’une vaste étude sur la prévalence du diabète et l’accès aux soins dans ce pays. Les auteurs ont estimé que la Chine comptait désormais 114 millions d’adultes diabétiques, ce qui représente une prévalence de près de 12 % dans la population adulte chinoise. Moins d’un tiers des personnes interrogées dans le cadre de l’étude connaissaient leur maladie et un quart seulement a déclaré être sous traitement.
Dans ce qui est peut être le constat le plus choquant, les auteurs de l’étude ont estimé que près de la moitié du total de la population adulte chinoise était pré diabétique, soit 493 millions supplémentaires de personnes susceptibles de souffrir de cette maladie débilitante et de toutes ses complications coûteuses. Réfléchissez à ce que cela signifie dans la deuxième économie du monde.
J’appuie sans réserve votre projet de stratégie sur le vieillissement et la santé. Les soins primaires à l’écoute des personnes âgées doivent être le point de départ d’une continuité de soins allant de la prévention et de l’auto administration des soins dans la communauté aux soins dispensés en ambulatoire, aux soins hospitaliers et en services spécialisés, aux soins de suite pour les personnes dont l’état de santé ne justifie plus un séjour à l’hôpital mais qui ne sont pas encore prêtes à rentrer chez elles.
Les personnes de plus de 60 ans deviennent le nouveau groupe majoritaire de population dans le monde. Ils vieillissent mais conservent leur caractère.
De plus en plus, ils insisteront pour avoir leur mot à dire dans leurs décisions touchant à la santé. Ce faisant, ils peuvent obtenir une aide et un pouvoir de négociation auprès d’associations de personnes âgées. Ils peuvent tirer parti de leur nombre pour exercer une influence politique dans l’intérêt de la santé publique.
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais faire une dernière observation. Cette Région avait une longueur d’avance en 2008 lorsque vous avez réussi la couverture sanitaire universelle, l’objectif qui devra orienter le renforcement des systèmes de santé.
Les perspectives nous permettent de penser que la couverture sanitaire universelle trouvera une place dans le programme de développement de l’après 2015. L’intérêt que suscite actuellement la couverture sanitaire universelle a insufflé un nouvel élan dans la vision des soins de santé primaires dans laquelle l’OMS et ses Bureaux régionaux ont une solide expérience à communiquer.
Parmi vos réalisations marquantes, je dois inclure les bilans des six stratégies de la Région relatives aux systèmes de santé qui feront l’objet de discussions au cours de cette session. C’est le type d’analyse que j’apprécie tout particulièrement, surtout à un moment où l’OMS a entrepris une réforme.
L’OMS a besoin de savoir si ses lignes directrices et conseils techniques ont effectivement un impact sur les politiques et les résultats sanitaires dans les pays. Cette analyse permet de tirer un certain nombre de leçons pratiques.
Ainsi, considérées ensemble, les six stratégies demandent aux pays de suivre 122 indicateurs. C’est beaucoup leur demander et ce système doit être simplifié.
L’analyse souligne un certain nombre de défaillances, notamment des systèmes inadaptés de registres et statistiques d’état civil, et l’utilisation irrationnelle des médicaments qui contribuent à la propagation de la résistance aux antimicrobiens.
Un aspect positif, l’analyse montre clairement que les recommandations techniques de l’OMS sont extrêmement précieuses dans la formulation de politiques mais aussi pour aider à convaincre les gouvernements à s’engager à financer le développement des systèmes de santé.
Mais ce constat est celui que je préfère. Ce qui est le plus précieux pour les pays, c’est l’expérience de terrain du personnel des Bureaux régionaux et des bureaux de pays. C’est ce qui fait toute la différence. C’est ce que l’OMS fait de mieux.
Je vous remercie.