En octobre 2016, Haïti a été frappé par l’ouragan le plus puissant des 50 dernières années. L’ouragan Matthew a fait énormément de dégâts, causant la mort de plus de 470 personnes, laissant plus de 175 000 personnes sans abri et décimant les infrastructures déjà peu nombreuses dont était doté le pays.
En dépit des ravages causés par l’ouragan, du matériel médical de l’OMS – notamment des nécessaires de diagnostic et de traitement du choléra et du paludisme – est arrivé sur les zones touchées dans les cinq jours suivant l’appel à l’aide.
Les agents de santé qui interviennent en cas d’urgence médicale ou d’accident parlent de l’« heure critique » pour désigner les minutes qui suivent un traumatisme et au cours desquelles l’intervention appropriée peut augmenter considérablement les chances de survie.
Pour les situations d’urgence sanitaire, le principe est le même. Que ce soit en cas de flambées épidémiques ou de crises humanitaires, une intervention rapide peut faire toute la différence.
« Nous savons qu’un dollar dépensé au cours des premiers jours peut permettre d’économiser 10 dollars quelques semaines plus tard », explique le Dr Peter Salama, Directeur général adjoint à l’OMS, Préparation aux situations d’urgence et organisation des secours. « Il est pourtant difficile de réunir les ressources nécessaires pour lancer des interventions dans des situations d’urgence qui peuvent se produire sans préavis. Ce déficit de financement augmente souvent le coût total ainsi que le nombre de victimes. »
Lorsque le virus Zika – qui peut causer des dommages neurologiques chez les nouveau-nés – a été déclaré urgence de santé publique de portée internationale en février 2016, il a fallu six semaines pour que les fonds promis par les donateurs puissent commencer à être utilisés.
En revanche, en Haïti, l’OMS a été en mesure d’agir plus vite grâce à un mécanisme de financement particulier, le Fonds de réserve pour les situations d’urgence.
La structure unique de ce fonds permet de mettre à disposition jusqu’à US $500 000 en moins de 24 heures. Cela peut permettre d’attendre qu’arrivent les autres sources de financement, notamment les engagements des donateurs, en limitant le danger.
En mai 2017, des grappes de décès inexpliqués se sont produits dans une région isolée de la République démocratique du Congo. L’OMS a déployé une équipe dans les 24 heures grâce au financement du Fonds de réserve pour les situations d’urgence. Fin juillet, la flambée de maladie à virus Ebola avait pris fin avec un bilan de quatre décès. Le déblocage rapide de US $2 millions a probablement permis de sauver des milliers de vies et d’économiser des milliards de dollars. À l’inverse, la flambée de maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest en 2014 a entraîné plus de 11 000 décès et il a fallu dépenser plus de US $3,6 milliards pour la contenir.
Plus tard dans l’année, Madagascar a été frappé par la pire flambée de peste pulmonaire jamais enregistrée, qui a fait plus de 200 victimes. L’OMS a débloqué US $1,5 million pour accélérer l’intervention, qui a consisté à envoyer 135 experts et plus d’un million de doses d’antibiotiques. En quelques mois, la flambée épidémique a été endiguée. La maladie ne s’est pas propagée en dehors de l’île.
À Cox’s Bazar, au Bangladesh, l’OMS a consacré US $5 millions issus du Fonds de réserve pour les situations d’urgence afin de répondre à la crise des Rohingyas. Les fonds ont servi à fournir des médicaments, à améliorer la sécurité sanitaire de l’eau et la surveillance des maladies, ainsi qu’à contribuer à la vaccination de milliards de réfugiés contre la rougeole, la poliomyélite, la diphtérie et le choléra.
À ce jour, le Fonds de réserve pour les situations d’urgence a permis à l’OMS d’intervenir rapidement sur plus de 50 flambées épidémiques, crises humanitaires et catastrophes naturelles, pour un montant supérieur à US $46 millions. En 2017, le Fonds a déboursé presque US $20 millions pour des opérations dans 23 pays, la plupart des fonds étant débloqués dans les 24 heures.
« Sans le Fonds de réserve pour les situations d’urgence, les flambées récentes de maladie à virus Ebola en RDC, de maladie à virus Marburg en Ouganda et de peste pulmonaire à Madagascar auraient pu dégénérer. Le Fonds est une source de financement fiable et modulable qui nous permet d’agir rapidement, ce qui rend le monde plus sûr », a ajouté le Dr Salama.
La structure simple en fonds commun du Fonds de réserve pour les situations d’urgence réduit en outre le coût des transactions. Les pays qui ne contribuent pas habituellement aux secours d’urgence – peut-être parce qu’ils ne disposent pas des systèmes ou des ressources financières nécessaires – peuvent ainsi apporter leur contribution. C’est le cas de l’Estonie, qui a versé à ce jour plus de US $145 000.
« Nous avons été témoins de la façon dont [le Fonds] permettait à l’OMS d’intervenir immédiatement pour relever différents défis, notamment pour lutter contre la fièvre jaune [dans plusieurs pays] et pour aider les populations frappées par l’ouragan qui a dévasté Haïti », a expliqué Taavo Lumiste du Ministère estonien des affaires étrangères. « Les fonds versés dès les premières heures d’une situation d’urgence permettent de sauver des vies et de faire des économies. Nous incitons d’autres donateurs à apporter leur contribution. »
L’Allemagne est à ce jour le plus gros donateur du Fonds de réserve pour les situations d’urgence, avec des contributions qui dépassent déjà US $13 millions. « Une urgence peut se produire à tout moment », a déclaré l’ambassadeur Ulrich Seidenberger, Représentant permanent adjoint au sein de la mission allemande à Genève. « L’OMS doit être dotée de la capacité et des ressources nécessaires pour intervenir immédiatement de façon adéquate. »