Après avoir signalé zéro cas humain depuis plus de deux ans, l'Éthiopie a enregistré six nouveaux cas suspects1 de dracunculose (maladie du ver de Guinée) au cours des deux dernières semaines. Tous sont originaires du district de Gog dans la région de Gambella.
« Les six nouveaux cas suspects de ver de Guinée sont des personnes qui ont utilisé l'eau de marres situées à côté d’une ferme industrielle. Toutes ces personnes font l'objet d'un suivi dans un centre de confinement2 », a déclaré le Dr Zeyede Kebede, Coordonnateur par intérim du programme MTN, Bureau pays de l'OMS, Éthiopie. « Quatre des cas suspects ont été détectés dans le village agricole de Dulli et deux autres dans deux villages différents, à savoir - Metaget Dipach et Wadmaro à Gog Dipach Kebele ».
Outre les 6 nouveaux cas suspects de dracunculose, 40 autres cas suspects sont également suivis au Centre de confinement des cas de ver de Guinée. En outre, environ 200 ménages ont été visités et 1254 personnes interrogées ont reçu une éducation sanitaire.
Le programme éthiopien d'éradication de la dracunculose (EDEP) poursuit le traitement des marres de la zone, en même temps qu’il évalue l'utilisation des filtres par les communautés. Le programme est en train de concevoir un mécanisme de suivi de l’utilisation des filtres pour en maximiser l’efficacité dans la lutte contre la maladie. L'EDEP prévoit également de travailler avec les parties prenantes concernées pour fournir de l'eau salubre aux communautés des villages concernés.
« Malgré le redéploiement du personnel de santé en raison de la pandémie dû au corona virus (COVID-19), la réponse à cette flambée de cas humains de ver de Guinée a été rapide et conforme aux protocoles établis », a déclaré M. Kassahun Demissie, coordinateur du programme national d'éradication du ver de Guinée, de l’Institut Ethiopien de Santé Publique (Ethiopian Public Health Institute). « Des enquêtes préliminaires ont été menées et des interventions immédiates ont été effectuées , y compris une recherche active de cas dans sept villages où les cas suspects ont été détectés et dans les villages à risque situés à proximité.»
Les autres interventions qui ont été immédiatement mises en œuvre comprennent:
- traitement au Temephos3de plus de 41 marres . Ceci s'ajoute au cycle régulier de traitement des marres éligibles de la zone;
- évaluation de l'utilisation des filtres et de leurs remplacements;
- conduite d'une éducation sanitaire dans tous les villages visités.
Une visite de terrain est également prévue dans la région par le point focal OMS pour les Maladies Tropicales Négligées et le Coordonnateur National par intérim de l’EDEP, du 24 avril au 1er mai 2020 pour supporter les équipes dans la conduite des activités de riposte à la flambée et de prévention.
Éradication de la dracunculose en Éthiopie
Depuis que l'Éthiopie a établi son programme national d'éradication de la dracunculose en 1994, des progrès considérables ont été accomplis pour réduire le nombre de cas humains, la plupart d'entre eux étant concentrés dans la région de Gambella.
Au cours de la dernière décennie, la région a, de manière persistante, signalé une transmission de faible intensité, y compris peu d'infections chez les animaux. En 2019, les responsables de la santé et du développement rural de la région ont annoncé une série de mesures visant à mettre fin à la transmission de la dracunculose. Ces mesures ont été prises à l’issue d’une mission de plaidoyer de haut niveau dirigée par le ministre fédéral de la Santé en 2019 au cours de laquelle une annonce d'un conseil pour superviser le fonctionnement du programme d'éradication dans la région a été faite.
Pour accroître la sensibilité du système de surveillance, les autorités ont également introduit une récompense en espèces pour la notification volontaire des cas de dracunculose.
En 2019, un total de 54 cas humains a été signalé à l'OMS, le Tchad ayant notifié 48 des 54 cas. Le Tchad signale également un nombre élevé d'infections animales.
Les trois autres pays qui ont signalé des cas humains l'année dernière étaient l'Angola (1 cas), le Soudan du Sud (4 cas), et le Cameroun (1 cas qui est probablement le résultat d’un débordement issu des villages endémiques voisins situés au Tchad). Le Mali, où se produisent des infections animales, n'a signalé aucun cas humain depuis 2016.
La maladie
La dracunculose est une maladie parasitaire invalidante causée par une infection par D. medinensis, un long ver filiforme. Il est généralement transmis lorsque les gens boivent de l'eau stagnante contaminée par des puces d'eau infectées par des parasites.
Au cours des années 80, la dracunculose était endémique dans 20 pays.
La recherche et le confinement des derniers cas restants, en particulier dans les contextes où les problèmes de sécurité et les populations sont déplacées, sont les étapes les plus difficiles du processus d'éradication.
1Les six cas sont macroscopiquement compatibles avec la maladie du ver de Guinée et sont en attente de confirmation en laboratoire.
2Des centres de confinement ont été créés dans des endroits choisis des régions d'endémie des pays signalant une transmission active de la dracunculose. Les centres sont équipés pour fournir un traitement et un soutien aux personnes infectées pour les empêcher de contaminer les sources d'eau potable.
3Le téméphos est un cyclopicide. Il est utilisé pour tuer les puces d'eau (cyclopes) qui transportent les larves infectantes de ver de Guinée.